Petite histoire des loges du G.O.D.F. à Montluçon

      1717 - Londres : Dans une brasserie située derrière Trafalgar Square près de Covent Garden et de Old Market, quatre loges anglaises décidèrent de s'unir pour codifier les nombreux et anciens textes qui régissaient les activités des Francs Maçons opératifs.
      1723 : Le Pasteur Anderson rendit publiques des constitutions regroupant tous les anciens textes avec le nécessaire dépoussiérage dû aux nouvelles et modernes conditions de vie : c'est l'acte de naissance de la Maçonnerie Spéculative.
      Fidèles à leur tradition, ces Francs Maçons spéculatifs de 1717, qui succédaient aux Maçons opératifs, conservèrent un respect et une admiration pour ceux qui ont tant contribué au rayonnement de l'art pratiqué dans le secret.
      Ils en gardèrent tous les symboles et tous les outils, supports à de nouvelles et enrichissantes réflexions sur l'Essence et l'Existence.

 

L’architecte.
Fresque du château de Chareil
dans l’Allier (XVI° siècle).

      Aujourd'hui encore, les Francs Maçons travaillent entre l'Equerre et le Compas, emblèmes de l'Ordre Maçonnique.
      La Franc Maçonnerie ne se reconnaît pas comme une quelconque école de pensée, elle est l'Ecole de la Liberté ; Liberté de Croire, Liberté de Penser, Liberté d'Agir.
      Elle œuvre au perfectionnement individuel de ses membres, et affirme la valeur éternelle des principes de culture humaine indépendamment des lieux et des époques.
      Elle donne aux Hommes et à leurs groupements la notion claire et certaine de la Solidarité, elle réunit dans ses Temples dédiés à la Sagesse des hommes épris de cet idéal, soucieux d'apprendre à vivre en commun quel que soit la différence de leur tempérament. Elle fait admettre la nécessité pour chaque membre de l'Ordre d'accomplir la tâche pour laquelle il est compétent, elle réhabilite tout travail, qu'il soit manuel ou intellectuel, toute fonction sociale chacun étant un élément de l'Harmonie totale et universelle.
      Partie de Londres, la Franc Maçonnerie spéculative se répandit très rapidement et très largement.

      Le premier essai de création d'une loge du Grand Orient de France à Montluçon date de 1831, au lendemain des Trois Glorieuses, tentative avortée d'instauration de la République. Cette loge fut dirigée par le Frère Gabus, horloger de son état, et comprenait 18 membres dont beaucoup d'artistes.
      Elle fut constituée le 30 août 1831 sous le titre distinctif Le Phénix, allusion à l'oiseau mythique. Ernest Montuses dans son histoire de Montluçon nous apprend qu'elle fonctionna 4 ans et qu'elle fut un foyer d'études libérales.
      Née avec l'espoir de l'institution de la République, cette loge disparut avec celui-ci. Mais fidèle à son nom, elle renaîssait le 15 novembre 1848 sous ce même titre distinctif.
      Là encore, la réouverture de la loge coïncida avec l'avènement de la Seconde République. C'est cette éphémère République qui rendit la grandeur à la France par le vote de la Loi Schoelcher sur l'abolition de l'esclavage. Ainsi, cette Liberté tant défendue par les Francs-maçons s'étendait-elle enfin à tous les Hommes quelque soit la couleur de leur peau.
      Espoir encore déçu, le Prince Président devenu Empereur, la loge de Montluçon se mit en sommeil en 1852. Il faudra attendre 38 ans pour qu'une loge s'ouvre de nouveau à Montluçon.

              

      C'est en 1890, plus précisément le 7 juillet, que fut constituée la première des loges actuelles du Grand Orient de France dénommée Union et Solidarité.
      Les documents de l'époque nous apprennent les conditions de création de cette loge ainsi que les membres qui l’animaient.
      Le 15 mars 1890 à 4 heures de l'après-midi, 14 Maçons se retrouvèrent dans la salle du Café de la Poste à Montluçon pour envisager la création d'une loge.

      Rapidement la décision fut prise, il restait à constituer le premier exécutif : Lucien Deslinières, né à Vierzon le 7 décembre 1857, exerçant la profession de publiciste et demeurant à Montluçon, fut désigné comme président.

     Parmi les créateurs, huit appartenaient auparavant à la Loge Equerre de Moulins, un à une loge parisienne, un à une loge d'Algérie, un à une loge de Mexico, un à une loge de Bordeaux, l'appartenance des deux frères restants étant inconnue.
      Les Frères vivaient dans toutes les villes entourant Montluçon, et Doyet, Bézenet, Durdat-Larequille, Marcillat donnèrent en particulier un fort contingent. Cinq avaient moins de 25 ans, quatorze moins de 30 ans, dix-huit moins de 40 ans, neuf plus de 40 ans.
      Sept d'entre eux étaient maires, ou le deviendront, à Bézenet, Montluçon, Doyet, Viplaix, Désertines, ou Colombier. De plus, deux d'entre eux seront plus tard députés : Etienne Lamoureux et Paul Constans. Un sera sénateur : Michel Boissier.
      La loge se mit au travail et organisa en novembre 1891 un congrès maçonnique départemental à Montluçon. Son ordre du jour est significatif :
      - Organisation d'un mouvement général pour réclamer la séparation des Eglises et de l'Etat.
      - Réforme de l'impôt.

      Le 8 février 1892 parut la première édition du "Petit Montluçonnais" journal républicain socialiste. Animé par Paul Constans, sa rédaction fut confiée à des frères sous la direction du frère Lucien Deslinières.
      Il sera l'outil de l'accession de Jean Dormoy, puis du Frère Paul Constans à la mairie de Montluçon, puis à la députation.

      Si les tentatives de création de loges à Montluçon en 1831 et 1848 ont avorté par manque du temps nécessaire pour leur rayonnement, celle de 1890 réussira pleinement puisque plus de 100 ans plus tard, elle existe toujours, compte plus de 60 membres, et a permis la création d’une seconde loge :

      Fraternelle Alliance Ecossaise

      L‘influence des loges du Grand Orient de France a aussi permis l'implantation à Montluçon de loges de quatre autres obédiences : Droit Humain, Grande Loge Féminine de France, Grande Loge de France, Grande Loge Traditionnelle et Symbolique Opéra.

      La Maçonnerie montluçonnaise est en effet beaucoup plus diverse qu'en 1890, elle est surtout plus forte, et tout laisse à croire qu'elle le deviendra encore plus dans les années à venir, tant les demandes d'intégration dans nos différentes loges sont nombreuses.

      Existent actuellement à Montluçon : Le Centre de l'Union (Grande Loge Féminine de France, 1977), La Pierre Angulaire (Droit Humain, mixte, 1980), L'Arbre de vie (Droit Humain, mixte, 1985), Saint-Jean l'Oméga (Grande Loge de France, 1984), La Pierre de Noirlac (Grande Loge Traditionnelle et Symbolique Opéra).

      Les Franc-Maçons actuels du Grand Orient de France à Montluçon, continuateurs de l'œuvre de ceux de 1890, répondent toujours aux vœux des créateurs de la Loge Union et Solidarité lorsque ceux-ci déclaraient dans la lettre de demande de reconnaissance au Grand Orient de France :
      "Nous sommes animés par le désir de travailler régulièrement pour la gloire de la Franc Maçonnerie et le bien général de l'Humanité".
 

Affiche de l'exposition de faïences maçonniques au musée de Montluçon, à l'occasion du centenaire de la loge Union et Solidarité.